Discours de Juliette CHESNEL-LE ROUX lors du débat d’orientation budgétaire 2024
Monsieur le Président,
Chers Collègues,
Au cœur des enjeux liés au logement, le débat d’orientation budgétaire se profile comme une étape clé pour définir les priorités financières et répondre efficacement aux défis actuels. Pourtant encore une fois le logement semble être oublié de vos priorités.
Il est alarmant de constater que notre collectivité sous-estime les investissements dans le logement social, dans ses choix budgétaires. On trouve chaque année des autorisations de programme non consommées en matière de logement. En 2022, cette négligence a atteint des proportions inquiétantes, avec un financement du logement social chutant de 8,4 millions à 6,8 millions, soit une baisse significative de 20%.
Bien sûr que certaines petites communes ont des difficultés à construire des logements sociaux dans notre Métropole. Elles doivent composer avec l’augmentation des risques naturels et la rareté du foncier constructible. Nous sommes bien au fait de tout cela, et nous ne le remettons pas en doute, et les règles SRU le prennent en compte.
Mais, Monsieur le Président, il est absolument scandaleux de se servir de l’exemple de ces petites communes pour alimenter votre diatribe contre la loi SRU comme si elle était la raison de tous les maux des finances de notre métropole et de la ville de Nice.
La situation de la Ville de Nice n’a rien à voir avec celle d’une petite collectivité rurale.
Et cette loi est en adaptation constante pour suivre les évolutions de la société. Je profite d’ailleurs de cette intervention pour saluer le travail de nos parlementaires sur le logement, en particulier Madame ESTROSI-SASSONE, qui n’a cessé de se battre pour faire évoluer cette loi, parfois contre vents et marées, de votre gouvernement.
Je relève aussi que la mairie de Cannes arrive à surpasser les objectifs de son PLH et atteint plus de 18% de logements sociaux. Comment font-ils ?
La Métropole de Nice, c’est 14% de logements sociaux, et sur 24600 demandes, moins de 2500 ont pu être pourvues. C’est seulement 72 logements nets livrés en 2022. C’est un rapport de la Fondation Abbé Pierre qui nous pointe du doigt.
Comparer la situation de Nice à celle des petites communes de la Métropole est pathétique. C’est de la poudre aux yeux pour dissimuler le manque de volonté de la Mairie. A Nice, on ne construit pas pour loger mais pour spéculer. Sur notre métropole, il y a autant de logements vacants que de logements sociaux, 33.000 logements vacants, 14.000 AirBnB et des projets immobiliers spéculatifs à la pelle, principalement pour Nice.
L’une des missions de la métropole, c’est bien d’accompagner les petites communes de son territoire, non seulement pour le logement de leurs administrés, mais aussi pour le financement des infrastructures nécessaires. Alors, que fait donc la Métropole Nice-Côte d’Azur de son budget ? L’emploie-t-elle à développer des projets de logement dans le Haut-Pays ? Ou le gaspille-t-elle dans des projets pharaoniques à plusieurs centaines millions dont on n’est même pas sûrs de voir l’aboutissement un jour ? La Ville de Nice dilapide les ressources de la Métropole au détriment de ses partenaires du Haut-Pays.
Je sais bien que sur ce sujet vous trouverez toutes les excuses, le foncier, la propriété privée, les investisseurs privés. Je ne critique pas pour m’opposer. Mais les faits sont là. Et Cannes fait mieux.
Et par ailleurs, nous vous soutenons toujours lorsque nous estimons que vos décisions vont dans le bon sens. Je me suis, par exemple, rangée de votre côté lorsque le Tribunal Administratif a annulé la réglementation permettant de limiter le nombre de locations touristiques. Je n’ai jamais rechigné à dire ce qui fonctionnait. Mais le corollaire c’est que je serai toujours intransigeante avec ce qui ne fonctionne pas ou ce qui devrait aller plus loin.
Avec peut-être un peu plus de mauvaise foi, vous me direz aussi probablement que l’Eco-Vallée est une «renaissance» de votre politique de logement. Et en parlant de “Renaissance”, vous vous vanterez probablement du fait que vos amis du Gouvernement l’ont désigné « territoire d’excellence engagé pour le logement ». Mais si vos grands discours peuvent avoir influencé quelques dirigeants dont vous êtes proches, nous, nous connaissons la vérité. Nous savons que le projet d’Eco-Vallée est un échec. C’est du bétonnage au coup par coup dans la Plaine du Var.
Alors oui, le reconditionnement des centaines de bureaux absurdement localisés dans la Plaine du Var offrira la possibilité de loger de nouvelles personnes. C’est exact. Mais ce n’est pas ce que j’appelle une politique du logement. La politique, c’est une affaire de choix. Ce sont des stratégies nourries à long terme pour être cohérentes et durables dans le temps.
Nice Méridia, c’était une promesse de 15.000 emplois… Mais aujourd’hui, ce sont des bureaux vides qu’il va falloir transformer en habitations. Ce n’est pas une grande victoire de votre part. C’est plutôt un rétropédalage organisé pour sauver les apparences. Vous n’avez fait preuve ici que d’un changement de cap bien obligé. L’Eco-Vallée est un échec aussi cuisant que vos orientations stratégiques et budgétaires.
Malgré ce fameux « Prix d’Excellence », nos concitoyens peinent toujours à se loger. La location d’un studio à Nice coûte plus de 700€. Très concrètement, si vous êtes enseignant, policier ou aide-soignant, vous n’avez plus les moyens de supporter votre loyer.
Aussi, je ne crois pas une seconde que la Ville de Nice soit une victime de la loi SRU et de l’État. Les victimes, ce sont les Niçois qui ne peuvent plus vivre là où sont nés leurs parents. Les victimes, ce sont les petites communes du Haut-Pays qui se retrouvent paralysées à cause des dépenses inutiles que vous avez engagées au nom de la Métropole et dont ces investissements leur manquent aujourd’hui cruellement. Les victimes, ce sont toutes celles et ceux qui ne pourront pas trouver un logement digne à cause de votre manque de vision à long terme.
Nous sommes ici dans un débat d’orientation budgétaire. En matière de logement, d’environnement ou de politique sociale, il n’y a aucune orientation à long terme. Et je le déplore gravement.